lundi 29 octobre 2012

Message à caractère préventif

Il y a trente ans, ce jour, naquisait un @mi et, à quelques jours près, 17 pour être exact, sortait le second album de Bobb Trimble, harvest of dreams.
Aujourd'hui sera donc un jour de rattrapage pour cet @mi qui, shame on him, ne semble point connaître Bobb Trimble et son sublime iron curtain innocence. M'en vais lui rafraîchir la mémoire et le remettre dans le droit chemin illico avec mon indispensable note sortie sur mon précédent blog. La preuve ?

Imaginez : vous êtes producteur ou sur le point de signer un artiste. Vous êtes en 1980, les grands albums sortis à cette époque sont le closer de Joy Division, le premier album des Feelies, le remain in light des Talking heads, le seventeen seconds des Cure, le metamatic de John Foxx, le I just can't stop it de The Beat ou encore le colossal youth de Young Marble Giants.  Vous nagez en pleine new wave, l'époque est aux corbeaux, au premier degré, bref on rigole pas tous les jours. Là vous tombez sur un gars qui lui n' a rien compris à l'époque dans laquelle il est. Il vous propose un album de folk. Qui plus est de la folk psyché. Vous vous dîtes : il est fou, pas la peine de le signer, ce sont les bacs à soldes direct avec ce qu'il propose. Vous l'écoutez par politesse, lui dîtes que ce qu'il fait est très bien et le remerciez d'être venu. Une fois parti, vous mettez les bandes à la poubelle parce qu'il vous a fait écouter c'est certes pas mal du tout mais ça a quand même au moins une dizaine d'année de retard. ça n'aurait pas dépareillé avec des groupes comme Comus ou des tarés comme Syd Barrett mais là, ça va à l'encontre des règles du marché. Faut pas déconner quand même faut rentabiliser le produit , non ?
Bon ce que je viens de décrire ci-dessus serait très certainement arrivé à Bobb Trimble s'il s'était présenté avec son disque dans les années 90 -2000. Fort heureusement pour lui comme pour nous, c'est à la fin des années 70 qu'il a présenté ses bandes et qu'est sorti cet anachronisme qu'est Iron curtain innocence. Car il faut sacrément être fou pour sortir un album dont on sait pertinemment qu'il ira dans les bacs à soldes à sa sortie mais sera adulé par une poignée d'aficionados dont je fais parti. Pour faire court et comme je l'ai dit plus haut il s'agit d'un album de folk psyché barré sur sa première face et  de pop folk de très très haut vol sur la seconde, alignant morceaux d'une délicatesse d'orfèvre (killed by the hands of an unknown rockstar) et classique immédiat digne du meilleur Beatles ou Love ou ce que vous voulez d'autre (one mile from heaven).C'est simple, en écoutant la première face on se dit que Greg Weeks d'Espers ou Ben Chasny de Six Organs Of Admittance ont du puiser là une bonne partie de leur inspiration (et notamment avec when the raven calls). Et quand on écoute la seconde, là on se dit qu'il n'a pas du écouté que les Beatles le gars Elliott Smith, il a du s'écouter en boucle ce chef-d'oeuvre tant la voix rappelle ici celle de Smith. Il n'y a dans ce disque que 8 morceaux avec deux fois one mile from heaven (une version courte, l'autre longue) mais ici tout est essentiel, rien n'est superflu, chaque note a sa place, chaque intonation se justifie. Le seul reproche qu'on pourrait lui faire est au niveau du son, de la production : il sonne très années 70. Pas pour moi en tout cas. Mais là, je ne sais pas si la critique se justifie réellement : c'est justement ce qui fait qu'il paraît hors d'âge, intemporel. Et parlons aussi de la pochette qui  est hallucinante : Bobb Trimble, gueule d'ange entre Balavoine et Syd Barrett, avec sa guitare électrique sur les genoux et une mitraillette à la main a de quoi laisser dubitatif.

Alors ???? ben à la lecture de cette note absolument indispensable il apparaît clairement qu'en 2012, ne pas connaître Bobb Trimble est passible d'une condamnation lourde, très lourde.
Alors M. Vilosophe, au vu de vos différents antécédents, soit vous vous jetez sur le premier cd ou vinyle à votre portée et vous comblez votre retard, soit vous serez condamné à subir dans une chambre noire, sono à fond, l'intégrale de Patrick Duffy et Mireille Matthieu en boucle jusque ce que saignement des oreilles survienne.Vous voilà prévenu. Je ne me répéterai pas.

dimanche 28 octobre 2012

la saloperie du dimanche

La quintessence des eighties, ça ressemble à quoi ??
La quintessence des eighties c'est des paroles concernées, une musique savante qui sait piocher chez les pionniers de la pop, du rock, une imagerie avant-gardiste, des chorégraphies qui coulent de source, fluides et travaillées.
La quintessence des eighties c'est également une attitude, sur de soi mais nonchalant, le requin cool, la classe à la Aldo, la frange rebelle.
En fait, la quintessence des eighties c'est Hugues Hamilton et son totalement  fou d'elle. C'est un putain de morceau qui te reste vissé dans le crâne pour au moins 24 heures sans que tu puisses y faire quoi que ce soit. C'est une scie imparable et indécrottable, un truc qui a obtenu l'A.O.C années 80 avec sa suite logique, à savoir retour à l'anonymat le plus complet après cette décennie maudite. Hugues Hamilton incarne les années 80, Hugues Hamilton EST les années 80.
Chapeau bas l'artiste.

samedi 27 octobre 2012

Th' Faith Healers : lido

Samedi jour du saigneur et du psychopathe.Veille du jour du seigneur, l'autre.
Pour ce faire, va falloir monter dans la delorean et bloquer les compteurs en 1992. Plus précisément juin. Pourquoi ???
Parce que je bosse à une trentaine de bornes de mon habitation principale.
Et alors ??? je vois pas bien où est le rapport.
Simple, mon con : pendant une bonne trentaine de minutes je me retrouve seul avec mon moi, mon ça et surtout pas mon surmoi dans ma voiture, auto-radio à fond. Hors pour satisfaire mon ça, il me faut de la musique qui dépote grave. Et depuis quelques semaines, tourne en boucle dans la caisse le génialissime lido de Th' Faith Healers.
Pour les ignorants qui ne connaitraient point Th' faith Healers,  c'est trois bucherons anglais, une serial killeuse, deux albums sur le meilleur label anglais des années 90 ( à savoir too pure), deux compiles (L' et les peel sessions), quatre EP pour quatre d'existence et une empreinte indélébile dans le rock anglais des années 90 voir au-delà (de mon point de vue hein). Une discographie en dent de scie (pour résumer : imaginary friend : bof ; L' : carte de visite rêche et fort prometteuse mais en deçà des capacités du groupe) mais avec un everest qu'aucun groupe indie, à ma connaissance, n'est parvenu à dépasser depuis 1992, date de la sortie de lido. En quoi lido est un everest au juste ? Simple : lido a su élever la tension au rang d'art . Ça fait un peu juste comme argument me direz-vous. Probablement mais dès que this time vous heurte les tympans, vous savez que vous êtes foutus, que vous en prenez pour trois quart d'heure sans pouvoir vous en défaire, accro à l'adrénaline qu'il dégage. Mais pas une adré polissée, gentille, calibrée pour une jeunesse révoltée en chemise à carreaux et jeans troués, non, là c'est directement Leatherface, le gentil gars spécialisé dans le taillage de bavettes façon XXL, qui vous susurre ses douces contines au creux de l'oreille. Enfin susurrer n'est peut-être pas le terme adéquate, à moins que le papier de verre version tesson pilé soit d'une douceur incomparable à vos oreilles.
Vous l'aurez capté, l'une des singularités de Lido est d'être rêche, très rêche, sans aucune compromission, sans un pet d'humour, carburant à l'urgence. Pour ce faire le groupe a viré les guitares pour les troquer contre des tronçonneuses, dégagé les grilles d'accord pour ne laisser que le strict minimum de notes, n'a pas tenu à s'emmerder également  avec l'accordage des instruments préférant laisser ça aux premiers de la classe et surtout a passé des heures voir des jours à réviser son Can pour en saisir la substantifique moelle.Car lido est peut-être l'un des rares descendants valables du groupe Allemand. Cette intransigeance, ce jusqu'au boutisme, ce besoin constant d'expérimenter dans son coin, d'aller au bout de leurs idées rappelle le Can de la grande époque.
A une différence près : Can expérimentait dans un cadre (que le groupe envoyait la plupart du temps valser) pop (pour rappel , vitamin C, mushroom) . Ici, que nenni. Enfin presque. Si le cadre reste pop (morceaux entre trois et six minutes, mémorisables), lido est tout de même joué par une véritable bande de psychopathes. Le guitariste ne joue pas mais scie littéralement ses cordes, chaque coup porté par le batteur semble faire hurler de douleur ses fûts, le chant de Roxanne Stephen n'est pas de plus adaptés ( franchement, quand elle chante l'amour, je n'aimerais pas être le partenaire en question. Il suffit d'écouter love song pour comprendre que sa perception de l'amour est différente de tout un chacun), seul le bassiste semble apporter un équilibre somme toute précaire à  cette bande de malades mentaux. Et pour appuyer ma thèse sur la psychopathie de ce groupe, il suffit d'écouter les deux derniers morceaux (et les six précédents), deux extrêmes. Quand le groupe calme le jeu en sortant les guitares acoustiques (it's easy being you), essaie d'être un tant soit peu léger, il ne peut s'empêcher de saboter la chanson en utilisant une sorte de tronçonneuse électrique qui vient la défigurer en plein milieu. Mais le pire dans lido c'est quand le groupe revisite à sa façon madchester ou encore le come together de Primal Scream sur spin 1/2 : ça pue la sueur, le sang, c'est la fête au travers du regard d'un psychopathe que rien n'affecte hormis la vision du sang. On imagine sans difficultés ce morceau en bande son du american psycho de Brett Easton Ellis  ou en B.O des chiens de paille de Peckinpah. on imaginerait même tout l'album illustrant ce film.
 Pour apporter une note "raisonnable" à cet album de déviants, je dirais que le seul morceau sensé dans ce grand disque, c'est la reprise absolument formidable du mother sky de Can. Le groupe a su en capter l'essence tout en gardant la tension inhérente à l'album. Bref, mother sky s'imbrique dans lido sans qu'on ne perçoive de différence au niveau des compositions.Preuve de la haute tenue de lido.

Alors au vu de la description que je viens d'en faire,vous me direz qu'il faut être un brin pervers pour s'envoyer ça à fond dans la caisse pendant une bonne demi-heure. Je vous rétorquerai que non, bien au contraire. Lido est tellement tendu qu'il sert littéralement de catharsis avant d'aller au boulot. La tension est si vive qu'on se dit que rien ne pourra être pire dans les huit heures qui suivront.Du coup, c'est la zen attitude en arrivant.
 Parce que, contrairement à d'autres,  j'ai aussi oublié d'être con.

mercredi 24 octobre 2012

Andy Stott : luxury problems

Eh les amis, Andy Stott sort un nouvel album ces prochains jours.
Ouaiiiiiiiiiiissssssssssss, super. Il en a de la chance ce garçon.
Et il fait quoi cet Andy Stott ??? de la polka javanaise sous acides ? de la bourrée auvergnate 2.0 ??
Mr Stott a gagné ses lettres de noblesse dans la minimal techno/dub façon Maurizio en sortant en 2006 un album honnête mais pas grandiose (merciless) et surtout une série d'EP assez remarquables dont deux l'an dernier qui lui ont valu la reconnaissance de nombre de webzines branchés : passed me by et we stay together.
Présentation faite, passons aux choses sérieuses : luxury problems.
Tous ceux qui appréciaient son boulot dans la veine Dub/techno voir ambient vont pouvoir passer leur chemin, le gars Stott s'est donné comme objectif d'attaquer les dance-floors avec nombre de chansons putassières à faire passer David Guetta pour Arvö Part. Pour ce faire, rien de plus simple : laisser tomber les instrumentaux torturés sur dix minutes avec silences de rigueur, employer une chanteuse, de préférence soul à gorge chaude et balancer un rythme binaire compréhensible par le moindre auditeur écervelé, donc moi .
 Programme fort alléchant ma foi.
Sauf qu'à l'arrivée luxury problems ressemble plus à une sorte de Moodyman en pleine phase parano qu''à la énième compile techno/mesbollocksonzetable sortie cette année. Ne vous fiez en aucun aux deux premières minutes de numb, évanescentes en diable, limite dream-pop,mais plus à la suite, techno à un demi beat par minute en vitesse de pointe, lourde, plombée. Si Andy Stott a abandonné, enterré une bonne fois pour toutes le dub/minimal techno avec ses différents EPs, là il signe les papiers de décès du dubstep en général, de Burial en particulier, et enfonce le quatrième clou du cercueil avec une morgue faisant plaisir à entendre. Il fait ainsi table rase des courants électros des vingt dernières années ( la drum'n'bass avec un up the box bradycardisé à mort, à deux doigts du coma, le dubstep, comme je viens de l'écrire, est à l'agonie, le dub est de l'histoire ancienne) mais se veut également le fossoyeur de la techno qui a contribué à sa renommée.  Car franchement, la sienne fait pitié à écouter : le pouls est à peine audible, les beats minimales, l'atmosphère y est glaciale, anxiogène au possible (à croire qu'il a enregistré luxury problems en direct du cercueil mobile qui lui sert de studio pendant que les invités lui envoyaient les dernières pelletés de terre à travers la gueule.).  Il y a parfois quelques tentatives de ranimer le cadavre en devenir (sleepless, up the box en mode défibrillateur en fin de course) mais celles-ci se soldent par d'heureux échecs Heureux car c'est justement cette morgue,ce pré-silence qui fait tout l'attrait de cette post-techno.
Vous me direz :  ça fait des semaines que tu en glandes pas une et tu nous reviens pour nous pondre des concepts à la noix. De la post-techno ?? et pourquoi pas de l'ante-java, de la prétektonik ou encore du perijungle ?? Hein ??? C'est quoi ce concept de merde ???. Ca paraît merdique mais c'est pourtant le seul terme qui me vient à l'esprit quand j'écoute luxury problems. L'impression d'écouter un album sous perfusion, de la techno qui ne veut plus en être, où tout semble désincarné, où seul le silence a voix au chapitre.
Ouhhh mais quelle habile transition ma foi pour parler de celle d'Alison Skidmore, élément nouveau chez Stott, qui apporte une touche d'humanité à ce disque en phase terminale. Et encore. L'humanité semble elle aussi en fin de vie quand Alison lui prodigue les derniers sacrements (lost & found) ou mal barrée quand elle s'égare chez le Lynch de Twin Peaks (leaving, doux écho du falling).
Bref, d'un point de vue moral, autant le dire tout net : il n'y a rien à sauver chez luxury problems. Quand tu penses avoir atteint le fond de l'abime en écoutant un morceau, celui d'après te rappelle que la terre est toujours suffisamment meuble pour que ta pelle continue à creuser indéfiniment. En revanche, musicalement parlant, comme vous l'avez compris précédemment, le programme est d'une richesse assez dingue : minimal et profond, répétitif sans jamais lasser, luxury problems saura accompagner votre dépression au plus profond de la mélancolie.
Au cas où vous ne l'auriez point compris : chaudement recommandé par mézigue.