lundi 11 juillet 2011

the beauty of depression

Quel con a dit que la musique devait être un truc pour faire la fête, éviter de réfléchir, quelque chose de dansant, gai qui permet de se libérer dans sa tête, oublier ses soucis ? Si jamais je le croise cet imbécile, je lui claque le baigneur et lui explose la tronche façon puzzle. Et je lui colle, seul dans une pièce avec le volume sonore à fond, the beauty of doubting yourself de Daniel Thomas Freeman. M'en vais lui faire changer sa perception de la musique à cet abruti moi. Ça lui apprendra.
Donc : Freeman est l'un des mecs de Rameses III, groupe free-folk/drone/ambient relativement inintéressant ayant à son actif une bonne demi douzaine d'albums chiant comme la lecture d'un traité de philosophie comparative entre Heidegger et Garcimore rédigé en araméen par un Stevee Boulay sous acides. Limite purge.
The beauty of doubting yourself est un triptyque.
L'album commence par deux drones de la mort qui tue. Une demi-heure dans le trou du cul d'un monde souterrain bien malsain, flippant où ne règne qu'humidité, peur, dans lequel ne subsiste aucune lumière, rien. En comparaison the descent, film de la peur sur des spéléologues amateurs en mal de sensations fortes, c'est winnie l'ourson au pays des bisounours. Immersion totale dans l'esprit malade, noir, désespéré de Freeman. C'est oppressant au possible, traversé de quelques trouées mélodiques (au bout d'un quinzaine de minutes de drone tout de même), de spiritualité (on y entend quelques voix/chants au lointain, signe d'une présence, d'une vie, et encore....), mais le sentiment dominant reste celui qu'on ne sortira pas d'ici vivant, ou alors en miettes. Le genre de morceaux qui n'incite pas à poursuivre l'aventure ou alors avec une corde et une poutre suffisamment solides pour supporter tout le poids du désespoir.
La seconde partie, composée de trois morceaux, plus courts, présente un Freeman émergeant peu à peu de son état léthargique. Les morceaux sont encore sombres, inquiets, mais plus désespérés. On y perçoit une mélancolie tenace ( le morceau titre notamment), des trouées lumineuses s'échappant de sous un épais vernis de drone oppressant ( le magnifique the might of angels) ou encore une inquiétude sourde. Le froid fait place à un réchauffement inattendu. Bon c'est pas encore le plein soleil, ni la fête au village, mais il y a de la vie, un soupçon d'espoir dans cette musique.
Réchauffement confirmé par la beauté des drones d'elegy and rapture et surtout de staring into light.
Elegy and rapture confirme ce retour à la lumière, lointain cousin du little red robin hood hit the road de Wyatt :  la mélancolie à la comissure des lèvres, les yeux encore rouges, le visage ravagé. Mais cette saloperie de mélancolie se retrouve balayée d'un revers de la main par l'acceptation d'un deuil commençant à s'estomper. The beauty of doubting yourself se conclue enfin par un staring into light apaisé, long morceau d'une douzaine de minutes, simple, rayonnant, presque solaire, véritable hymne à la vie, retour en grâce et fin d'un processus dépressif.
Outre la beauté intrinsèque de cet album, ce qui m'a littéralement cloué sur place, scotché, c'est l'humanité qui s'en dégage. La musique comme témoignage d'une psychothérapie, d'une évolution positive, vraie, c'est suffisamment rare pour être remarqué. Quand en plus cette humanité s'exprime au travers d'une musique électronique faite de drones, je me dis pour le coup qu'il s'agit presque d'un exploit que de parvenir à la rendre aussi humaine. La composition de cet album a été pour l'auteur un processus douloureux qui a duré six années. The beauty of doubting yourself en est le témoignage plutôt brillant mais amène plusieurs interrogations. La première est quelle direction prendra la musique de Rameses III après la parution de cet album ? la seconde, plus vache, quand va-t-il nous refaire une dépression ?

Autant le dire, je ne suis pas le seul dans la blogosphère à avoir trouvé cet album magnifique. Je rejoins complétement  l'avis de Little Reviews, ici mais contrairement à lui, j'ai accroché dès les premières secondes. Les trente premières minutes m'ont littéralement soufflées. Mais bon, pour que ça m'atteigne autant, peut-être suis-je un dépressif qui s'ignore.



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