mercredi 3 novembre 2010

Sharron Kraus

Dans un forum, un pote a posé aux participants une question toute con : Et s'il ne devait en rester que dix, auteur-compositeur-interprète, quels seraient-ils ? Aux traditionnels Robert Wyatt, Nick Drake, Mark Kozelek, etc...., un imbécile heureux, qui ne semble pas avoir la lumière à tous les étages, a répondu ceci : Sharron Kraus.
Sharron quoi ?? Kraus. C'est quoi ça ?? Encore une nana qui fait de l'ambient  à deux balles et qui destine ses productions austères à des ados boutonneux attardés de 50 ans à peine sortis de leur crise d'adulescence ??
Ben pas du tout.
Sharron Kraus fait dans le folk à la Shirley Collins et pond,  avec la régularité d'un coucou suisse, tous les deux ans environ, trois maintenant, un chef-d'oeuvre à chaque nouvelle sortie d'album. Ça a commencé en 2002 avec un premier album remarquable, qui posait toutes les fondations de l'oeuvre à venir. Beautiful twisted proposait un folk sans âge dominé par une voix absolument remarquable, une ambiance moyen-âgeuse, très anglaise (ne pas oublier de rappeler que Sharron Kraus est une américaine pur jus) faite de banjo (beaucoup), de guitares accoustiques, de violons lancinants. Deux ans plus tard, elle refait le coup du chef-d'oeuvre en sortant son plus bel album : songs of love & loss. Sur celui-ci elle pousse le concept encore plus loin en élargissant sa palette. L'album embrasse tous les folklores : celui d'Angleterre certes mais aussi celui d'Amérique. L'union des deux donne au final un album magnifique, d'une délicatesse que n'aurait pas renié Nick Drake, la plaçant comme la digne héritière d'une Bridget St John ou encore d'une Shirley Collins. Pourtant, malgré ces influences plus qu'écrasantes, Sharron Kraus parvient à créer un univers qui n'appartient qu'à elle, identifiable entre tous.
En 2007, l'heure de la consécration sonne enfin. The fox's wedding se vend par camions entiers, déversant sa musique sur tous les postes de radio du monde via le label grand public durtro. Du génial David Tibet, autre folkeux barré plus connu sous le nom de Current 93. Kraus sombre alors dans les excès inhérents à cette nouvelle condition : l'alcool, la drogue,  puis la prostitution pour avoir sa came et enfin le meurtre. Un chemin de croix qui ne trouve la rédemption que dans un nouvel album sorti le 2 novembre dernier depuis l'hôpital psy qui l'a prise en charge suite à son emprisonnement.
Bon ok, c'est du grand n'importe quoi. Kraus sort avec the fox's wedding son album le plus accessible, le plus "grand public". Elle élargi un peu son audience sans compromission mais rencontre plus un succès d'estime qu'autre chose. Trop européenne/anglaise pour les américains, trop austère ou intemporel pour le reste du monde.
Outre ses albums sous son propre nom, elle en sort d'autres en collaboration dont un magnifique avec deux Espers : Meg Baird & Helena Espvall. Un pas terrible sous le nom de  Tau Emerauld (collaboration avec Tara Burke de Fursaxa, seul faux-pas d'une carrière jusque là exemplaire) et encore un autre avec Iditarod.

Sharron Kraus construit, en l'espace de trois albums plus les à-côtés, une oeuvre d'une rare cohérence, d'une grande beauté. Elle fait ce qu'elle sait faire de mieux : un folk a/intemporel, libéré. Cependant, comme pour ses illustres aînés à leur époque, tout le mode s'en bat royalement le coquillard. On la redécouvrira probablement dans vingt ans quand un type du genre Bananahart Split l'invitera sur son disque, comme l'autre l'a fait avec Vashti Bunyan.
En attendant, elle sort un nouvel album, excellent as usual, the woody nightshade. Qui fera l'objet d'une prochaine note. Voilà.

1 commentaire:

  1. Marre de tous ces bloggers qui ne font rien d'autre que se tripoter la nouille sans jamais rien partager. Honte à vous monsieur.

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